mardi 3 mai 2011

Obama a suivi en direct la mort de ben Laden

C'est depuis la "Situation room" de la Maison-Blanche que le président américain et ses plus proches conseillers ont suivi minute par minute le déroulement de l'opération qui a conduit, dans la nuit de dimanche à lundi, à la mort du leader d'Al-Qaïda.

Dimanche après-midi, l'atmosphère dans la "Situation room" de la Maison-Blanche, cette salle ultra-sécurisée et dédiée au suivi minute par minute des situations de crise, était tendue et les regards anxieux, alors que les participants avaient les yeux rivés sur l'écran où ils pouvaient suivre le déroulement de l'opération lancée contre ben Laden au Pakistan. Outre Obama, étaient présents la secrétaire d'Etat Hillary Clinton, le secrétaire à la Défense Robert Gates, le conseiller à la sécurité nationale Tom Donilon et le premier conseiller de Barack Obama pour les affaires de terrorisme John Brennan.

La décision n'avait pas été facile à prendre. C'était deux jours plus tôt, le vendredi, que Barack Obama, après une nuit de réflexion, avait décidé de donner son accord pour lancer l'opération. Une première réunion de deux heures avait déjà eu lieu la veille, le jeudi, dans la "Situation room", et le débat avait fait rage entre les plus proches conseillers du président. Trois scénarios se présentaient : lancer l'opération, effectuer une attaque aérienne ou bien attendre, afin de savoir avec plus de certitudes si l'homme le plus recherché au monde se trouvait bel et bien dans cet intrigant complexe d'Abbotabad, au nord d'Islamabad, au Pakistan. Jeudi, à la fin de cette réunion, les conseillers d'Obama étaient toujours divisés et le président américain avait alors décidé de reporter sa décision finale au lendemain matin. Résultat de ses réflexions nocturnes : "On y va".

"Nous l'avons eu"

Pourtant, personne, y compris Barack Obama, n'était sûr jusqu'à la fin de l'opération qu'Oussama ben Laden se trouvait bien dans cette cache. Mais le report de l'opération pouvait augmenter le risque de fuites et voir ben Laden s'échapper une nouvelle fois. Un autre aspect avait fait pencher la balance en faveur d'une opération : les forces de la Navy Seal, qui avaient effectué de nombreuses répétitions de l'assaut, étaient fin prêtes pour mener l'opération spéciale.


"Ces moments ont sans doute été les plus angoissants de la vie des gens qui étaient rassemblés ici", a raconté John Brennan, ancien responsable de la CIA et conseiller de Barack Obama pour l'antiterrorisme, en levant le voile lors d'une conférence de presse sur le déroulement de l'assaut contre la villa d'Abbottabad. "Les minutes étaient longues comme des jours, et le président était très inquiet de la sécurité de nos équipes. Beaucoup de gens retenaient leur souffle, et il y avait un certain silence qui régnait, au fur et à mesure de la progression" de l'opération commando. "Lorsque nous avons finalement appris que ces (membres du commando) avaient réussi à pénétrer dans le complexe et trouvé un individu identifié comme ben Laden, il y a eu un grand soupir de soulagement". Si l'opération héliportée avait mal tourné, Barack Obama aurait pu se retrouver en très mauvaise posture politique, au moment où il vient de se lancer dans la campagne électorale de 2012. Il a pris un risque calculé, selon John Brennan : "Le président a dû évaluer la solidité des renseignements et a pris ce que je pense être l'une des décisions les plus audacieuses qu'ait eu à prendre un président de mémoire récente".

La tension a atteint son comble lorsque l'un des hélicoptères est tombé en panne en pleine opération. "Lorsque cet hélicoptère s'est retrouvé immobilisé, d'un seul coup, il a fallu passer à un plan de rechange. Et ils l'ont fait sans accroc", a assuré John Brennan. Le conseiller a également révélé que les Etats-Unis n'avaient pas prévenu les responsables pakistanais "avant que tous nos gens, tous nos appareils soient sortis de l'espace aérien pakistanais. A ce moment-là, les Pakistanais étaient en train de réagir à un incident dont ils savaient qu'il était en train de se produire à Abbottabad", a-t-il ajouté, en laissant entendre qu'un affrontement entre forces américaines et pakistanaises aurait pu se produire. "Nous étions évidemment inquiets de voir les Pakistanais faire décoller en urgence leurs avions", a reconnu John Brennan. "Ils n'avaient aucune idée de qui pouvait être là, les Etats-Unis ou quelqu'un d'autre. Heureusement, il n'y a pas eu d'affrontement". La réaction d'Obama à l'issue de la mission? "Nous l'avons eu", a répondu John Brennan.